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4 février 2019

Luc-Laurent Salvador - Les Européennes : un formidable moyen de pression pour les Gilets Jaunes

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Les Européennes : un formidable moyen de pression pour les Gilets Jaunes

Oui, la liste Levavasseur est une récupération pure et simple par le même vieux système qui, de manière mensongère, prétend donner au peuple une représentation. Il ne s’agit pas d’une erreur de casting mais presque. Car une liste de candidats tirés au sort et s’engageant sur l’honneur à respecter un mandat défini par les collectifs Gilets Jaunes permettrait d’avoir ENFIN un fonctionnement réellement démocratique et SURTOUT d’exercer la pression plus que jamais nécessaire sur la classe politique tout en conservant le capital de sympathie et le soutien d’une population qui ne comprendrait plus dorénavant que l’on continue à bloquer ses routes, ses commerces et ses services.

 Les Gilet Jaunes en ont assez que la mort soit leur seule issue certaine à la vie chère et aux taxes. Ils veulent reprendre le contrôle de la situation caractérisée par, encore une fois, la vie chère, les taxes tous azimuts, la destruction des services publics, la privatisation du bien public, etc. Les Gilet Jaunes veulent le pouvoir. Ils ne veulent pas être consultés, ils veulent décider. Ils veulent ce que l’on n’a jamais vu depuis la Révolution : une démocratie réelle qui leur permette de changer la donne.

Avec raison ils se méfient du système qui nous a placés dans la situation où nous sommes. Au-delà du seul RIC, ils veulent un gouvernement du peuple, pour le peuple, par le peuple et non par des représentants qui, — avec l’article 27 de la constitution — lui volent son pouvoir. Notamment le pouvoir de création monétaire qui a, lui, été abandonné, de manière criminelle, aux banques, contre un plat de lentilles. Cette trahison explique à elle seule la situation que les Français connaissent étant donné qu’ils sont devenus des esclaves de la dette souveraine. Tout le fonctionnement social est contraint par la (prétendue) nécessité de rembourser cette dette ignoble qui dépasse à présent les 2300 milliards d’euros et qui fait du paiement des seuls intérêts un des plus importants budgets de l’Etat.

Donc oui, il nous faut absolument sortir de ce système et c’est pourquoi, la Liste Levavasseur est une erreur [1] monumentale, une parfaite récupération à laquelle une large majorité de Gilets Jaunes s’est d’emblée opposée et, à bon droit, tant il est évident que cette liste fonctionne exactement comme a toujours fonctionné notre système politique : en mettant en avant quelques polichinelles qui nous font des belles promesses qu’ils trahiront ensuite allègrement.

Une nouvelle brochette de marionnettes du système ne changera pas le système. Par contre, des candidats tirés au sort et s’engageant sur l’honneur à respecter les volontés des collectifs citoyens dont ils seront issus, cela serait proprement une révolution. Après deux siècles de démocratie volée par les politiciens de tous bords, nous là une occasion inespérée de changer le cours des choses.

Mais le malaise engendré par la liste Levavasseur risque d’en amener beaucoup à refuser ou à se retirer du terrain politique en opérant un repli sur soi et sur ce qui a marché : les blocages. Or, cela aussi serait une erreur, au demeurant très compréhensible car nous sommes des êtres d’habitude. Nous nous attachons avec raison à ce qui donne des résultats, cela nous rassure et nous donne espoir. L’efficacité évidente qu’ont eu les actions de terrain des Gilet Jaunes donne tout naturellement envie d’y revenir. Mais dans un monde complexe, changeant et imprévisible, le risque est grand de prolonger une action au-delà de sa zone d’efficacité et c’est particulièrement vraie lorsque celle-ci été parfaitement accomplie et qu’elle a réussi. Grâce leur en soi rendue, les Gilets Jaunes ont, en effet, parfaitement réussi la phase initiale d’un mouvement porté par l’émotion et la colère d’une population brimée, tonsurée, extorquée, abusée. Leurs actions de blocage des routes et de l’économie ont amené nos gouvernants à écouter la France d’en-bas : celle-ci a pris la parole, elle s’est faite entendre et a obtenu que s’ouvre un large débat au plan national. [2]

On pourrait critiquer longuement et avec raison la manière dont celui-ci est organisé [3]et douter a priori des conclusions — probablement déjà écrites — qu’on voudra en tirer mais les assemblées citoyennes qui se forment et discutent à tous les niveaux d’organisation du pays sont autant de preuves sûres et certaines que l’action des Gilets Jaunes a porté ses fruits.

Or, comme chacun sait, il y a un temps pour tout, pour le labour, pour les semailles puis pour la moisson. Actuellement, avec les débats qui se tiennent un peu partout sur le territoire national, c’est le temps des semailles, les idées germent : la population ne comprendrait pas qu’on se remette à labourer le terrain en mettant à nouveau la France sens dessus dessous.

Ceci vaut aussi pour toutes les actions de grève qu’on nous annonce. Quelles que soient les affinités ou même la sympathie qu’ils peuvent ressentir à l’égard de ces mouvements, les Gilet Jaunes seraient vraiment les idiots du village s’ils se faisaient récupérer par les syndicats sous le prétexte fallacieux que leur protestation rejoint les demandes des Gilet Jaunes. Les grèves c’est quand même le meilleur moyen qu’ait trouvé le système pour épuiser la volonté populaire en divisant le peuple. Qui se rappelle la dernière grève qui a porté des fruits. Quelques anciens peut-être ?

Non, les fruits de nos semailles démocratiques ne peuvent être récoltés que dans le champ politique, c’est-à-dire, dans l’espace où se règlent toutes les questions qui préoccupent les Gilet Jaunes

Bref, on peut penser que l’émotion et la colère d’une population brimée voire abusée se sont légitimement et fructueusement exprimées par les actions de blocage de la fin de l’année 2018 mais qu’il est à présent temps qu’elles s’affirment dans le débat démocratique qui a cours et qui doit déboucher tout naturellement dans le champ du politique, là où s’exerce le pouvoir, là où se prennent les décisions sur lesquelles les Gilets Jaunes entendent dorénavant peser.

Cet espace ne peut être laissé aux politiciens car, depuis la Révolution, à de rares exceptions près, nous avons toutes les preuves qu’ils ont servi davantage l’intérêt de la finance et du capital que celui du peuple.

Laisser le champ politique aux politiciens serait une erreur monumentale que les Gilets Jaunes ne peuvent se permettre car elle décevrait cruellement une population dont la manière systématique de voter en s’opposant ou en sanctionnant le pouvoir en place prouve suffisamment qu’elle porte dans son cœur le même cri qu’ont clamé les populations opprimées d’Amérique du Sud : « qu’ils s’en aillent tous » (que se vayan todos) ![4]

S’ils souhaitent voir leurs revendications satisfaites, les Gilets Jaunes ne peuvent compter sur aucun des politiciens en place. Ils doivent les remplacer et l’organisation du champ politique est justement faite pour ça, via les élections.

La conquête du pouvoir passe par le politique et commence donc avec les élections européennes. Celles-ci constituent une occasion idéale de poursuivre le combat et le débat tout en venant progressivement au pied du mur politique, le mur de la « cité », là où on verra le maçon gilet jaune à l’œuvre pour l’édification d’un monde réellement démocratique. Un monde dans lequel le peuple dans son ensemble sera le seul dépositaire du pouvoir ; ce pouvoir souverain dont nos aristocraties élues successives nous ont continûment spoliés depuis plus de deux siècles tout en prétendant incarner une démocratie.

Refuser cette évidence serait comme vouloir jeter le bébé politique avec l’eau du bain des magouilles, mensonges, abus et violences innombrables autant qu’innommables qui ont émaillés la vie politique des cinq Républiques.

La politique n’est jamais que le prolongement des discussions que nous avons dans nos assemblées citoyennes : il s’agit toujours de s’accorder sur des valeurs, des priorités puis sur une vision de la situation à partir de laquelle nous saurons quelle direction prendre, quelles actions entreprendre. Il s’agit ni plus ni moins que d’un processus de décision et si nous souhaitons que le peuple retrouve et conserve ce pouvoir, alors il ne faut pas le donner à des politiciens, des professionnels du boniment dont le premier mensonge consiste à nous faire croire que leur démarche est désintéressée et ne vise qu’à servir l’intérêt général.

Certains objecteront qu’il serait vain de s’aventurer sur ce terrain tellement éloigné des préoccupations des Gilets Jaunes. Ceux-là n’ont rien compris qui ne voient que la marge de manœuvre de nos gouvernants n’a cessé de se rétrécir depuis Maastricht car c’est l’Europe qui fixe les caps à tenir, notamment au plan financier. Quelle plus belle manière de mettre les pieds dans le plat que d’amener une flopée d’émissaires des Gilets Jaunes à Strasbourg ?

Grâce aux gilets jaunes, les citoyens de ce pays ont enfin l’occasion de voir les choses en grand : on nous dit que le véritable pouvoir est à Bruxelles, alors marchons sur Bruxelles !

Si le peuple répond présent et tout porte à penser qu’il le fera, nous pourrons exercer une formidable pression sur le gouvernement qui sera bien obligé d’accéder à nos demandes et surtout la principale, le RIC intégral, avec lequel nous serons en mesure de changer la Constitution et de réaliser, enfin, une démocratie réelle. 


[1] Comme l’a reconnu à demi-mots son directeur de campagne et initiateur, Hayk Shahinyan dans le post du 28 janvier 16h34

[2] Sans même parler des concessions immédiates mais trompeuses qui leur ont été faites au plan financier dans l’espoir assez vain de les apaiser.

[4] Tous les politiciens lâches et/ou corrompus qui, par action ou par inaction, ont engendré la situation inique dans laquelle se trouve la population.

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