Au train où vont les choses, il n’est pas exclu qu’il faille faire de tels constats pour d’autres secteurs d’activité tant la financiarisation ronge nos bases industrielles et agricoles.
Les plans de licenciements en cours cachent la question fondamentale d’un risque de décrochage en France dans des secteurs qui ont longtemps été considérés comme ses points forts dans le cadre de la division internationale du travail. Nous avons récemment vu ce qui s’est passé avec les masques, puis les respirateurs artificiels, maintenant avec les vaccins, mais on pourrait aussi parler des difficultés dans l’industrie automobile, celle des tracteurs aujourd’hui disparue, de l’aéronautique, des turbines pour l’énergie, du tourisme désormais avec un lourd plan de suppression d’emploi annoncé dans le groupe Accor cette semaine. Et, il faut examiner le déchainement avec lequel la grande presse –Le Figaro, Le Monde, Les Echos– se déchaine pour faire accepter l’achat de Carrefour par un groupe Canadien.
Au passage, il nous est parfois demandé pourquoi nous contestons la concentration des journaux et médias entre quelques mains, des possédants du capital. Nous venons d’en avoir une terrible démonstration.
Le groupe LVMH de M. Arnault est à la fois actionnaire de Carrefour et propriétaire du groupe de journaux « Les Echos - Le Parisien » ; le fait qu’il veuille vendre avec d’autres ses actions de Carrefour pour payer une part de l’achat du groupe américain de luxe Thyphanie a conduit naturellement les journaux dont il est propriétaire à demander d’accepter de vendre un fleuron, capitaliste certes, mais fleuron tout de même de la grande distribution française. Pire encore : la radio de service public offre tous les matins un éditorial économique à l’un de ses rédacteurs en chef pour faire accepter le système dont ce bradage. Le projet de vente de Carrefour n’a strictement rien à voir avec l’intérêt national, mais tout à voir avec l’intérêt de quatre capitalistes qui en faisant monter le prix de leurs actions en retireront une importante plus-value pendant que la caissière des supermarchés reste au régime sec, pour ne pas dire dans la précarité.
Il s’agit pourtant de ces caissières dont ces mêmes journaux ont loué il y a quelques mois le travail pour permettre aux citoyens de faire leurs courses. Une fois de plus, je me permets de redire que les travailleurs, les citoyens de France ont la chance de disposer d’un journal communiste avec l’Humanité.
Pour revenir à notre sujet, on ne peut pas dire que le pouvoir prépare l’avenir quand on constate que 9% des postes de travail supprimés le sont dans le secteur de la recherche. A ceci il faudrait ajouter le mauvais sort fait à l’école, à l’université, et le projet de supprimer les zones d’éducation prioritaire.
L’enjeu d’une réflexion nouvelle sur les moyens d’une planification démocratique pour redresser la France devrait être posé avec plus de force et de constance.
La stratégie du gouvernement n’est faite que de tâtonnement, parce que les causes des difficultés ne relèvent pas d’un diagnostic partagé. Les moyens de faire face à la pandémie non plus. Un large comité de combat contre la maladie associant réellement les élus, les syndicats, les groupes parlementaires, des chercheurs et médecins, des directeurs d’hôpitaux changeraient la manière de faire. Surtout, il conviendrait de garder le cap des préconisations de l’Organisation mondiale de la santé : tester-tracer-isoler en cas d’infection. Certes il y a aujourd’hui plus de tests mais il ne semble pas que la stratégie du traçage et de l’isolement soit mise en œuvre comme il faudrait.
____________
Une autre épidémie fait rage et cause des dégâts dans le sud-ouest de la France : la grippe aviaire dite « influenza aviaire » provoquée par le virus H5N8. En 2015-2016, le virus de cette grippe aviaire était le H5 N1. C’est ainsi la troisième fois que cette région est touchée par cette maladie qui fait des ravages dans les élevages de canard. On dénombre ce samedi 264 foyers dont 224 dans le département des Landes et déjà 700 000 volailles abattues.
Là encore c’est le système qui pousse à la concentration des élevages pour que chaque agriculteur puisse dégager un revenu minimum qui est pour une part essentielle la cause de la propagation de la maladie. Les oiseaux migrateurs, qui participent à la diffusion du virus, font d’autant plus de dégâts que la densité de volaille est importante et la production segmentée. Cela conduit à multiplier les déplacements de fermes en fermes accélérant la propagation du virus.
On constate d’ailleurs une mortalité exceptionnelle de ces oiseaux partie intégrante de ce que l’on appelle « l’avifaune sauvage ». Il n’y a pas de transmission du virus aux êtres humains.
Nous avons une pensée pour ces éleveurs qui, une nouvelle fois, souffrent durement et se retrouvent bien trop seuls. La solidarité nationale devrait pourtant leur être acquise. Comme pour Covid-19, cette nouvelle épizootie est un nouveau signal d’alerte sur la préoccupante nature des problèmes environnementaux, avec la destruction des habitats naturels qui engendre le rapprochement entre faune sauvage et domestiques et des activités humaines, ce qui contribue à l’émergence de nouveaux virus. Là encore, il convient de revenir à une agriculture paysanne familiale avec des élevages plus petits, plus diversifiés. Mais cela ne peut se faire qu’en assurant un revenu décent aux travailleurs-paysans.
____________
Beaucoup de celles et de ceux qui ont l’habitude de s’informer sur l’actualité sportive, nationale ou internationale, avec nos confrères de L’Equipe sont frustrés de ne pas trouver leur journal depuis une semaine. Ce quotidien d’autant plus lu que les enjeux sportifs sont importants est précisément victime de la réduction des compétitions sportives. Comme dans d’autres journaux, des plans d’économies et de réductions d’effectifs sont en cours. Ces nouvelles inquiétantes surviennent après d’autres qui concernent désormais tous les journaux et menacent le pluralisme.
Ce mot, parfois incompris ou galvaudé, est porteur d’une charge culturelle mésestimée. En effet, moins de journalistes dans un journal c’est forcément moins d’enquêtes, moins de reportages, moins d’expertises faute de temps et de personnes pour les réaliser. Car faire un reportage, ou une enquête nécessite du temps, des échanges, des jours d’observations avant d’écrire son article. La qualité des journaux dépend donc du nombre de journalistes qui y travaillent et des moyens qu’on peut leur donner. Sans cela, l’uniformisation de l’information va se poursuivre, à priori de façon « naturelle » mais en fait à cause d’une insidieuse mécanique, mortifère pour sa qualité. Il y a bien ici un combat large à mener, non pas seulement pour empêcher des suppressions d’emplois –voir de services– dans les journaux et médias mais pour disposer de plus de journalistes et de médias traitant de l’actualité à partir « d’angles différents », faisant vivre la controverse politique, économique, sociale, idéologique, culturelle. C’est en ce sens qu’il est de la responsabilité constitutionnelle de l’Etat d’assurer ce pluralisme et d’empêcher la concentration accentuée des médias et journaux.
J’ai la semaine dernière ici même porté une violente critique non pas contre l’Etat mais contre les banques qui refusent d’octroyer un prêt non pas à l’Humanité mais à l’une de ses filiales, la régie publicitaire et d’événementiel Comédiance.
Vous avez été des centaines à relayer notre message sur les réseaux sociaux, provenant d’horizons divers, citoyens d’origines militantes multiples dont de nombreux parlementaires de différents groupes au Sénat et à l’Assemblée nationale. Nous vous remercions toutes et tous. Cet engagement a porté de premiers fruits non pas auprès des deux banques en question mais auprès du pouvoir politique qui, depuis plusieurs heures, s’engage pour trouver une solution.
Quel est notre problème ? Les budgets de communication publicitaire ont diminué et notre régie n’a pu organiser les événements prévus en 2020. Ceux-ci sont reportés pour cette année et 2022. Ceci fait que le modèle économique de Comédiance sur trois ans est parfaitement viable et est capable de supporter le remboursement d’un emprunt. Or, sous couvert de la fragilité de la presse et du fait que nous n’avons pas fait d’emprunt ces dernières années, ces banques nous ont confirmé en termes peu sympathiques vendredi matin en présence de l’un des commissaires à l’exécution du plan de continuation de l’Humanité qu’il refusait définitivement un prêt garanti par l’Etat, violant ainsi la convention qu’elles ont signé avec celui-ci pour le soutien aux entreprises, à l’emploi et à l’économie.
Ceci est totalement insupportable. D’autant plus que tous les journaux (à l’exception d’un magazine départemental) ont bénéficié de tels prêts et que le groupe Lagardère en a obtenu un d’une valeur de 465 millions d’euros.
Notre demande est de 2,3 millions d’euros. C’est donc bien une volonté de nous prendre à la gorge, alors que ces banques ne prennent strictement aucun risque. Nous allons donc mener toute cette semaine encore le combat pour obtenir satisfaction.
|